le cancer de A-Z: Entretien avec le Pr Paul Ndom, Chef du Centre Medico-social de l’Universite de Yaounde II

A l’occasion de la célébration de la journée mondiale du cancer, le Pr Paul Ndom, Onchologue , Chef du Centre Médico-social de l’Université de Yaoundé II, et Secrétaire permanent du  Comité national de lutte contre le cancer, a échangé avec notre rédaction pour éclairer la lanterne de la communauté universitaire sur cette pathologie.

 

Professeur, quand se célèbre la journée mondiale du Cancer  ?

La journée mondiale du cancer se célèbre tous le 04 février chaque année.

Pourquoi la journée mondiale du Cancer et quel est le thème de cette année ?

La Journée mondiale du Cancer est consacrée depuis 13 ans à la sensibilisation de l’opinion mondiale sur la problématique du cancer.  Le thème de cette édition 2019 est « je suis un tel, je dois faire telle chose ». Ce thème a pour but d’interpeller les différents acteurs, toute la communauté mondiale à participer à la lutte contre cette pathologie, car l’Etat seul ne peut pas réussir à vaincre le cancer. Il faut que chacun puisse apporter sa contribution avec ses moyens dans le lieu où il se trouve et avec son expérience.

Quelles sont les causes du cancer ?

Les causes sont multiples et dépendent du type de cancer. Il y a  l’hépatite B qui finit par causer le cancer du foie ; le HIV/Sida qui cause les cancers cutanés appelés les « Sarcome de kaposi » ; « epstein barr virus» qui provoque les lymphomes qui sont une tumeur qui se manifestent par des ganglions au niveau des aisselles et même dans la cavité abdominale ; le « Human papilloma virus » qui est vraiment responsable des cancers au niveau du col de l’utérus.

Il y a  également le tabagisme qui cause le cancer du poumon ; les peintures que nous utilisons ; la poussière aspirée par les casseurs des pierres ; la forte consommation d’alcool ; la consommation de certains aliments mal conservés comme les graines de maïs, de blé, d’arachide et enfin des champignons qui peuvent causer le cancer du foie.

Quelles sont les manifestations du cancer ?

Les manifestations sont liées au type de cancer, à sa localisation, à son agressivité. Chaque cancer en fonction de sa localisation présente des signes et des symptômes. Les signes de cancer ne se cachent pas. Au départ c’est lent, mais progressivement ça devient bruyant.  Une femme par exemple atteinte du cancer du sein a une forte poitrine parce qu’un nodule est entrain de grossir dans le sein. Ce nodule peut se fistuliser, se percer comme un abcès et devenir très dangereux. Le sein commence à couler au point de mouiller le soutien, la robe, etc.  Chez certaines personnes, l’abdomen qui est plat devient comme une grossesse de six mois parce qu’il y a une tumeur qui se développe à l’intérieur, etc. Le cancer se manifeste aussi par une forte transpiration et à tout moment chez des personnes qui présentent des lymphomes avec des ganglions aux aisselles dans la région inguinale. Dans les leucémies, il y a des patients anémiés, pâles, etc.

Est-ce qu’on guérit du cancer professeur, si oui comment se passe le traitement ?

Il y a des cancers qu’on guérit. Ce sont des cancers dont le diagnostic est précoce. C’est-à-dire les cancers dépistés très tôt avant qu’ils ne commencent à se développer, avant qu’ils ne fassent des métastases. C’est dire que le malade de cancer précoce peut guérir de cette pathologie lorsqu’il est pris en charge immédiatement après dépistage par les centres agréés ayant des médecins compétents dans le traitement du cancer.

Les traitements du cancer sont variés et dépendent du stade de l’arrivée du malade à l’hôpital. Pour le traitement, la chirurgie est indiquée quand la tumeur est précoce et palpable. Après la chirurgie, il peut avoir la chimiothérapie, en fonction de ce qu’on a observé à l’analyse de la pièce qu’on a enlevé chirurgicalement. Il y a aussi la radiothérapie, des rayonnements qu’on peut envoyer dans la zone concernée.

La plupart des malades de cancer arrivent tardivement à l’hôpital, lorsque la maladie est déjà à une phase très avancée. Qu’est ce qui justifie cela?

L’arrivée tardive des malades de cancer à l’hôpital s’explique simplement par le manque d’informations sur cette pathologie. Les populations ne suivent pas les médias, les programmes de santé, elles ne s’informent pas sur cette maladie. Ces populations n’écoutent pas des personnes formées, et préfèrent courir vers des guérisseurs qui parlent de cancer pourtant ils n’en ont pas la maîtrise. Il y a également la pauvreté ambiante qui ne permet pas à certaines personnes de se rendre à l’hôpital pour se faire consulter.

Quelles sont les stratégies mises en place jusqu’ici  pour lutter contre cette maladie ?

Au niveau du comité national de lutte contre le cancer, nous allons créer des centres de dépistage et de diagnostic précoces des cancers dans les 10 régions. Ainsi les gens pourront s’y rendre tous les jours pour se faire consulter. Ce qui nous permettra de lutter efficacement contre cette maladie. Le dépistage va nous permettre de rechercher des signes qui peuvent évoluer vers le cancer si rien n’est fait. C’est-à-dire trouver des anomalies qui peuvent générer le cancer. On pourra donc recenser les cas précoces de cancer.

Quelques chiffres ? 

L’année prochaine il y aura des données plus fiables concernant  toute l’étendue du territoire national. Mais selon les statistiques  de l’Hôpital Général de Yaoundé pour cette année, en moyenne sur 1000 malades reçus à l’Hôpital Général et atteints de cancer, 66 % de cancers concernent les femmes. La plupart de ces cancers se retrouvent chez les personnes jeunes entre 41 ans et 50 ans, pourtant à l’Etranger, la majorité des cancers c’est après 50 ans.70% des malades de cancer arrivent à  l’hôpital à des phases tardives. Le cancer du sein garde la palme d’or.

Peut-on prévenir le cancer ?

Oui on peut prévenir le cancer. Il y a des pays où on ne parle plus du cancer du col de l’utérus. Tout simplement parce que les jeunes filles avant leur premier rapport sexuel, prennent le vaccin contre le HPV. Il y a aussi des vaccins contre l’hépatite qui préviennent le cancer du foie.

Il y a également une bonne hygiène de vie, les exercices physiques et sportives, le fait de ne pas rester à côté des fumeurs, le fait de ne pas prendre l’alcool, avoir une alimentation saine, manger beaucoup de légumes, des fruits.

 

Entretien réalisé par Josianne  Ndigui B